Éclairages éthiques

samedi 4 mai 2013


Vivants jusqu’à la mort Accompagner la souffrance spirituelle en fin de vie.

Tanguy Châtel (Albin Michel)

L’ouvrage s’ouvre sur une citation de Maurice ZUNDEL :
"Le vrai problème n’est pas de savoir si nous vivrons après la mort, mais si nous serons vivants avant la mort " et se clôt sur une dernière phrase : " accompagner, c’est aimer la vie, passionnément. " C’est sans doute un livre qu’il convient de lire en commençant par la fin, les ultimes cinq dernières pages éclairant et donnant leur souffle à tout le livre. On pourra aussi si on le souhaite lire en premier les témoignages d’accompagnements, intenses et très touchants.

On ne présente plus Tanguy Châtel : c’est une personnalité reconnue dans le monde des soins palliatifs. Il se penche dans cet ouvrage sur une souffrance particulière rencontrée par les personnes en fin de vie : la souffrance spirituelle. L’ouvrage est traversé de quelques récits extrêmement forts d’accompagnements vécus par l’auteur. L’idée force est : comment saisir et comprendre ce que peut être la souffrance spirituelle, et comment l’accompagner, tout en restant dans notre cadre de référence non-religieux et laïque ? Et, au fur et à mesure, l’auteur nous amènera à saisir que, pour lui, c’est la souffrance spirituelle qui constitue le noyau de toute souffrance.

Au travers d’un parcours aussi bien historique que sociologique et sémantique, Châtel revisite l’approche de la souffrance globale, approche usuellement segmentée en quatre domaines un peu disjoints, chacun étant plus ou moins pris en charge par un "spécialiste" :
le domaine physique, appelant l’aide du soignant ; la souffrance psychologique demandant le soutien du psychologue correspondant ; l’aspect traditionnellement nommé "spirituel", réservé à la compétence du religieux, prêtre ou ministre du culte ; enfin la sphère sociale demandant l’aide du bénévole ou de l’assistant social.

L’auteur se livre à un complet retournement de perspective en situant la souffrance spirituelle comme à la racine de toutes les autres. Cette douleur fondamentale s’exprimera alors de différentes formes et prendra les différents visages énumérés ci-dessus.

Le cœur même de notre souffrance spirituelle est le besoin relationnel insatisfait, relation à une forme de transcendance, relation à l’autre, relation à soi-même dans sa profondeur et son intériorité.
À la classique dualité matière/esprit, il propose de substituer un triangle : le pôle du corporel, celui du psychologique, de "l’âme" ; et le domaine du souffle, de l’esprit.

L’accompagnement consiste dès lors à accepter la rencontre de deux humains dans leurs communes ignorances et impuissances, à simplement oser dire : "je suis là, avec toi". C’est une présence dans l’être plus que dans le faire, et dans ce lien qui peut (peut-être) s’établir, chacun est appelé à rencontrer sa dimension intérieure ultime.

Tanguy Châtel nous suggère que l’accompagnement est une pratique du spirituel au sens de dimension, plus que d’une pratique spirituelle au sens religieux du mot.
Au décours de la lecture, c’est une rencontre avec nous-mêmes et avec notre pratique de l’accompagnement que nous sommes invités, de quoi insuffler de la joie et du bonheur simple fait (d’essayer) d’être là, avec celui qui souffre, "simplement" présents.

François




Lune de miel amer

Nicolle et Olivier Carré (Albin Michel)

C’est sur le mode du dialogue avec son mari Olivier que Nicolle Carré va relater son expérience : une leucémie foudroyante et la mort approchée de très près à deux reprises. Saisissante lune de miel où deux personnalités extrêmement différentes analysent en profondeur ce que la maladie très grave accomplit au plus profond de soi et du couple.
Pour nous, bénévoles d’accompagnement, un éclairage passionnant sur le fonctionnement du couple confronté à la maladie, ainsi qu’une réflexion fouillée et sans complaisance sur les grands thèmes soulevés par la fin de vie : croyances, dignité, accompagnement, euthanasie, pour ne citer qu’eux...

Béatrice


Derniers fragments d'un long voyage
Derniers fragments d’un long voyage.

Christiane Singer - Editions Albin Michel, 2007

Cet ouvrage nous a été signalé par Tanguy Chatel au cours de notre Journée du 26 Mars 2011 et il m’apparaît lumineux ! L’auteure décrit au jour le jour, quand cela lui est possible, les 6 derniers mois de sa vie, depuis l’annonce de la maladie, en passant par les traitements et les douleurs inhérentes, avant d’entrer en soins palliatifs et vivre la fin de son existence.... Ses propos sont tellement intenses qu’ils m’ont semblé ne pouvoir être retransmis qu’en citant directement Christiane Singer, elle-même.

Au passage, les bénévoles accompagnants noteront des étapes qu’ils connaissent bien : " Mon potentiel de ressentiment me sidère ", " La tentation du désespoir m’assaille, la plus violente des tentations, la plus redoutable de toutes ", " Enfer de la souffrance " et puis, " Depuis que cette généreuse pompe qui neutralise la douleur est en place, le martyr a cessé. D’une part, je perds en apparence mes forces vitales, comme une coulée lente et compatissante. De l’autre, je gagne les forces neuves de la non-résistance " mais " Comment trouver le juste équilibre entre lâcher prise et garder un certain tonus " ?….

Quels sens prennent ses épreuves pour C. Singer ? " J’ai touché le lieu où la priorité n’est plus ma vie mais LA vie. C’est un espace d’immense liberté " ou encore, " Comment aurais-je pu soupçonner que je puisse être encore si heureuse ? D’un bonheur sans fin, illimité, qui ne veut rien, qui n’attend rien, sinon l’émerveillement de chaque rencontre, de chaque seconde ! Je dis bonheur par pudeur mais ce qui m’habite en vérité est plus fort encore ".

Et elle délivre ce message à des congressistes de "Terre du Ciel " : " … ce qui est bouleversant, c’est que quand tout est détruit, quand il n’y a plus rien, mais vraiment plus rien, il n’y a pas la mort et le vide comme on le croirait, pas du tout. Quand il n’y a plus rien, il n’y a que l’Amour. C’est la substance-même de la création. Alors, amis, entendez ces mots que je vous dis là comme un grand appel à être vivants, à être dans la joie et à aimer immodérément.... "

Pour terminer, et à l’usage des bénévoles, cette réflexion sur l’accompagnement : " Tous les êtres sont émouvants de bonté et d’amour, jusqu’à la ligne sensible de démarcation où viennent suppurer les conseils, le savoir théorique qui doit à tout prix être communiqué. À ce moment se produit une dégradation dans la relation : le visiteur a succombé à la tentation d’aider ! La singularité de la rencontre est perdue car dans la rencontre du malade, n’est respectueux que le non-savoir radical. Ce qu’il vit, il est le tout premier à le vivre "

Jacqueline



Une vie pour se mettre au monde

Marie de Hennezel et Bertrand Vergely

Dans une vie arrivent nécessairement des moments où nous nous sentons moins forts pour effectuer des mêmes activités. Nous atténuons la fatigue de ces activités avant parfois d’y renoncer. Notre retraite souvent souhaitée vivement peut nous rendre mal à l’aise avec des sourires jaunes et des difficultés pour nous situer. Que devenons-nous ? Comment vieillir sans éprouver comme « un naufrage » ?

Marie de Hennezel et Bertrand Vergely nous entraînent à réfléchir à partir de témoignages de personnes remarquables comme Stéphane Hessel, Sœur Emmanuelle ou Christiane Singer ou encore de personnes anonymes dont nous pourrions être. Chacun des deux auteurs propose des développements d’abord séparés dans les premiers chapitres « vieillir » puis « mûrir » avant de croiser leurs réactions dans un dernier chapitre «  accomplir ».

Tous deux mettent en évidence une piste : quand nos forces physiques s’amenuisent, des forces intérieures sont davantage disponibles pour approfondir notre attention et poursuivre notre «  mise au monde ». Avec clarté et émotion ils recherchent les motivations et les fondements spirituels de cette piste-là, toujours à retrouver au-delà des imprévus et des changements qui nous affectent.

Daniel



La caresse de l’ange

Terrangle Jean-Louis, Presses de la Renaissance, Paris, 2002.

L’auteur de cet ouvrage a fait une intervention en fin d’après-midi, le vendredi 8 octobre dernier, au congrès de l’UNASP. Son dynamisme et son enthousiasme m’ont interpellée. Ceci m’a poussée à aller chercher quelques informations sur cet orateur. C’est ainsi que j’ai pu découvrir ce magnifique ouvrage, véritable hymne à la vie et à l’amour, dont j’ai envie de vous partager quelques mots sans vous en dévoiler le contenu de façon à maintenir la curiosité de chacun en éveil.

Pour cela, je ne vous parlerai pas du premier métier de l’auteur, mais ceux qui se rappellent de sa voix, de son humour, de sa présence lors de son intervention sont en mesure de le deviner. Vous brûlez si vous avez reconnu en lui un artiste. Mais lequel ?

Qu’en est-il actuellement de cet homme qui sait se laisser bousculer par les événements et vivre sans préjugés l’imprévisible ?

« Au moment où l’épidémie du sida s’intensifie, il fonde avec Marie de Hennezel, l’association Bernard Dutant : Sida et ressourcement. Aujourd’hui, il s’investit comme psychothérapeute et formateur et il intervient dans le cadre de l’accompagnement de fin de vie et du deuil dans le secteur hospitalier.  »

Cet ouvrage commence par l’accompagnement d’un mourant et se termine par celui d’une naissance. Entre les deux, le lecteur va suivre le parcours d’un homme qui sait par expérience combien la vie est précieuse tant elle est fragile. Il parle du sida, de la mort, de l’homosexualité, de l’hôpital, du couple, mais aussi de son appétit de vivre et de l’amour car c’est un être qui n’a pas peur de vivre, d’aimer et d’être aimé. Pour lui, tout est possible.

J’ai été très émue à la lecture de ce livre plein de tendresse, d’attention et de générosité qui colorent cet écrit d’une belle humanité.

Un exemplaire de cet ouvrage est disponible dans notre bureau à Baclesse. Deux autres sont en cours d’acquisition pour Villers et La Girafe.

Danielle


Bouddhisme et souffrance

Se dégager de la souffrance éprouvée est une préoccupation première du bouddhisme. Cette souffrance est souvent liée à notre éparpillement et notre enlisement dans notre égo. Le bouddhisme propose une méthode pour retrouver l’unité du corps et de l’esprit et ainsi de la cohérence et de la sérénité pour alléger cette souffrance. Déjà en restant assis le dos vertical, la simple attention et prise de conscience au va et vient de notre respiration, «  ici et maintenant  » permet de retrouver notre calme en quelques minutes. Il est possible en méditation assise ou « zazen » de développer la prise de conscience d’autres attentions à notre corps puis d’attentions à nos sensations, à notre esprit et à des objets de notre esprit. Un texte qui date de 25 siècles détaille ces différentes attentions, «  le Sutra des quatre établissements de l’attention ». Thich Nhat Hanh fait une présentation actuelle et claire de ce Sutra dans son livre «  Transformation et Guérison  ». (spiritualités vivantes - Albin Michel) La cohérence et la sérénité recherchées dans cette démarche méditative ne se limitent pas à nous-mêmes. Elles envisagent aussi tous les êtres vivants et tout l’environnement avec lesquels nous sommes en interactions.

Daniel Chevassut est médecin à l’hôpital nord de Marseille où il tient une consultation de la souffrance. Il est de tradition bouddhiste et il dit combien sa pratique de la méditation l’aide à prendre en compte la souffrance des patients qu’il reçoit. (Voir sur internet son entretien à ce sujet : accompagner la vie-entretien avec Daniel Chevassut).

Dans nos accompagnements les attentions à la personne malade ou en fin de vie supposent des attentions suffisantes à nous-mêmes. Toutes ces attentions rejoignent sur bien des aspects les attentions en jeu dans la méditation bouddhiste. Nous trouvons des exemples de cette proximité dans les préoccupations de l’association «  semdrel  ». (Voir les textes proposés sur son site dans la partie «  réflexions »).

Par ailleurs aussi, un exposé sur l’accompagnement bouddhiste à la fin de vie peut être lu sur le site « denshinji.fr » dans la partie « textes et traductions de Maitre Kengan ».

Daniel


vivre et mourir comme un homme
Vivre et mourir comme un homme

Guide pratique des soins palliatifs et de l’accompagnement de fin de vie.

Cécile B.Loupan avec Laetitia Dosne - Ed. de l’Œuvre, 191 p., 15 €

Dans l’abondante littérature sur la fin de vie et l’euthanasie, le livre de Cécile B. Loupan est un ouvrage à retenir. À la charnière entre un « guide pratique des soins palliatifs », comme l’auteur le définit elle-même, et une réflexion beaucoup plus personnelle sur la place de la mort dans notre société, la manière dont on l’occulte et ses conséquences.

Ainsi, le premier mérite du livre de cette bénévole, qui accompagne des personnes en fin de vie à l’hôpital ou à domicile, est d’offrir des outils pour ne pas être dépassé lorsque se pose la prise en charge d’un proche qui va mourir. On y trouve à la fois une approche historique et philosophique des soins palliatifs en France, une explication précise de la loi Léonetti récemment étoffée, de même qu’un chapitre intitulé « Où s’adresser ? » avec une liste d’adresses précieuses, depuis la Sfap (Société française d’accompagnement et de soins palliatifs), jusqu’à l’Espace éthique de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, en passant par des associations de référence. Un public averti n’apprendra rien de nouveau, mais il s’agit d’une synthèse claire et bien ficelée - donc utile -, que le député UMP des Alpes-Maritimes, Jean Léonetti, a d’ailleurs choisi de préfacer.

Le second mérite de l’ouvrage est de ne pas s’en tenir à une approche sèche et désincarnée, à laquelle aurait pu conduire la volonté d’écrire un guide. Tout au contraire. Nourri d’expériences vécues, le livre prend parfois la forme d’une « conversation » intime, où l’auteur, membre de l’association ASP (Accompagnement bénévole en soins palliatifs), confie ses convictions sur la manière dont notre société aborde le moment si délicat de la mort. Mais c’est aussi là que se situe sa limite.

Très engagé contre l’euthanasie, considérant, qu’« éliminer le malade pour supprimer la douleur est la négation de cette relation qui, qu’elle qu’en soit la difficulté, est l’essence de l’être humain », le texte aurait sans doute gagner à laisser le lecteur mûrir sa propre opinion. Au fil des pages, si convaincants et étayés que soient les arguments en faveur du développement des soins palliatifs, totalement incompatibles pour l’auteur avec l’euthanasie, l’ouvrage ne laisse guère de part aux arguments adverses. Dommage, Vivre et mourir comme un homme n’en aurait eu que plus de force.

Marine Lamoureux (critique parue dans le quotidien La Croix du 12/10/2010.



Faut-il légaliser l’euthanasie ?
de Luc Ferry et Axel Khan - Ed. Odile Jacob, 144 p., 11,90 €

Alors que des sénateurs vont débattre, en janvier, d’une proposition de loi légalisant l’euthanasie en France, Luc Ferry, philosophe et Axel Khan, médecin, conjuguent leurs plumes pour défendre une société qui s’en tient, au contraire, à l’interdit de tuer.

La force de ce petit ouvrage ne tient pas seulement à la clarté de leur style ou à la finesse de leurs analyses ; mais aussi paradoxalement, à la place faite aux partisans de l’aide active à mourir. Autrement dit, ce livre résolument engagé contre la légalisation de l’euthanasie en France ne craint pas d’ouvrir ses pages aux arguments de la partie adverse.

Dès le premier chapitre, Luc Ferry tient ainsi à rappeler que l’utilitarisme anglais, en tête de la lutte pour l’euthanasie, « traduit une authentique vision du monde », loin de se confiner à « une doctrine glorifiant l’égoïsme et la poursuite des intérêts privés ». Il donne le ton. Pas question pour lui de caricaturer l’action de certains groupes, comme l’association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) ; ni de passer sous silence de réelles interrogations, comme l’agonie de malades vis-à-vis desquels la loi Leonetti préconise l’administration de sédatifs et la suppression de l’hydratation, plutôt qu’une mort par injection létale.

À cet égard, le choix de l’interview d’Axel Khan, dans le deuxième chapitre, est efficace, puisqu’il donne lieu à un échange d’arguments contradictoires.

Le troisième chapitre, enfin, remet en perspective la législation française et décrypte, de façon courte et pédagogique, deux visions du monde, celle des pro et des anti-euthanasie.

Un outil intéressant pour qui veut aller plus loin que le traitement trop souvent superficiel de ce débat complexe. (Critique extraite du quotidien La Croix du 7/12/2010).


LA MORT APAISÉE. Chroniques d’une infirmière en soins palliatifs.

GAGNET ( E.et M. ) - Editions de la Martinière. 2007.

En consultant les emprunts de livres de la bibliothèque des accompagnants bénévoles, j’ai été frappée par le "succès" de cet ouvrage que j’ai voulu comprendre. C’est un livre plein d’humanité écrit par deux femmes. L’une d’elles, Elise, infirmière en soins palliatifs a confié à sa sœur journaliste, Michaëlle, sa vie quotidienne d’infirmière en équipe de nuit dans un service de soins palliatifs.

Elle parvient à relater plusieurs fins de vie de patients, jeunes et moins jeunes, avec une rare spontanéité, une sensibilité et une émotion assumées, avec humour aussi quelquefois, avec une humilité qui ne se dément pas au fil des pages, avec une grande finesse d’analyse et une lucidité constante dans la relation parfois conflictuelle aux médecins et à l’administration. En dépit des expériences traversées par des remises en cause, des doutes, de la lassitude, des sentiments de solitude, des erreurs qu’elle reconnaît elle-même, envers et contre tout, Elise va poursuivre son activité auprès ces patients-là...

Sans analyser la totalité des thématiques abordées ni cerner l’intégralité de la pensée de l’auteur à propos de chacune d’elles, je voudrais seulement rapporter, à titre illustratif, certaines réflexions qui me paraissent rejoindre le questionnement récurrent des accompagnants bénévoles, anciens ou débutants, concernant par exemple, les points suivants :

Qui peut accompagner ? « Travailler dans ce service n’est pas si facile. Il faut être gai, justement, être jouisseur et pas morbide. »

Peut-on accompagner tous les patients ? « Il y a... des patients qu’on n’a pas envie d’accompagner. »

Peut-on rester insensibles ? « Même en ne connaissant pas nos patients, nous étions parfois pris par nos émotions. »
Qu’en est-il de la douleur ? « Ici, les douleurs des patients ne sont pas seulement physiques, elles peuvent être psychologiques et aggraver ainsi les souffrances corporelles. Tant que l’esprit n’est pas apaisé, le corps souffre et inversement. »

Que représentent les derniers instants ? "Je suis persuadée que soulager les douleurs physique et psychique des patients, ne pas leur confisquer leur mort permet à ces hommes et à ces femmes, pourtant si vulnérables, de rester maîtres, malgré tout, de leurs derniers instants... J’ai la certitude profonde que ceux que j’ai accompagnés ont choisi eux-mêmes le moment de leur mort. Un moment précis, jamais anodin, toujours important pour eux."

Comment accompagner ? "Quand j’ai débuté, c’était mon obsession. Que faut-il dire ? Que faut-il faire face à un patient en fin de vie ? Mes collègues me répondaient toujours d’un ton évasif : il faut ÉCOUTER, tu verras bien, c’est avec le temps qu’on apprend ! Il faut, je crois, d’abord accepter qu’il n’y ait pas toujours de réponses aux questions des patients, sur leurs peurs de mourir, sur l’injustice de leur maladie. Il y a des règles : ne pas parler de la mort si le patient ne l’évoque pas, respecter ses silences et, bien sûr, ses secrets. Mais après, chacun a sa méthode... Je les rassure, je crois, en restant discrète et disponible. Avec un peu d’humour aussi. Je me sens à mon aise dans ces échanges : c’est aussi un trait de ma personnalité : je préfère écouter que m’exposer. Il m’a fallu des mois pour apprendre et je n’aurai jamais fini. Parler peu mais choisir les mots justes, voilà, je crois ce que l’on attend de nous."

Est-il possible de s’exprimer en termes d’aide ? "Pour nous, aider un patient, c’est d’abord l’écouter sans le juger et de façon active. Je l’écoute, assise à sa hauteur, en le regardant. En général, je reformule les questions ou remarques que la personne soulève mais sans l’influencer. Le but étant de l’aider à avancer dans sa réflexion."

Peut-on acquérir une expertise ? "Ce métier n’aide pas à aborder la mort d’un proche. Je suis une professionnelle de l’accompagnement pour les inconnus, pas pour ceux que j’aime."

Voici quelques propositions parmi bien d’autres, développées dans ce livre. Et si vous avez envie maintenant de vous plonger dans sa lecture, alors mon pari est gagné !

Cet ouvrage nous ouvre des pistes de réflexions et de discussions sur les conceptions et les pratiques d’accompagnement qui animent chacun d’entre nous et qui pourraient être l’objet d’une journée d’étude. Il serait en effet pensable d’organiser un débat sur la spécificité de l’accompagnement infirmier et de l’accompagnement bénévole ou encore sur la question de savoir si parler d’ "aide" pour un accompagnant est encore concevable... Et d’autres choix tous aussi pertinents s’offrent à nous.

Jacqueline


Peut-on vraiment choisir sa mort ? Repères pour les citoyens et ceux qui les soignent.

Dr B.DEVALLOIS. Préface de Jean Léonetti. Editions Solilang. 2009

Le Docteur Devaflois, anesthésiste-réanimateur de formation a présidé la Société Française d’Accompagnement et de Soins Palliatifs de 2005 à 2007. Actuellement, il est responsable de l’Unité de Soins Palliatifs de l’Hôpital de Puteaux.

Son ouvrage se présente d’abord comme une réflexion éthique qui cerne les enjeux médicaux, sociaux, juridiques, humains de cas relevant de l’expérience clinique de l’auteur et des « affaires » médiatisées, ces dernières années, autour de Vincent Imbert, Chantai Sébire, etc.

A leur propos, le Dr Devallois revient sur la réalité des faits rapportés et la simplification outrancière des informations concernant les différents acteurs de ces tragédies. Il analyse les questions qui ont trait à la fin de vie : l’obstination déraisonnable, l’arrêt de l’alimentation, de l’hydratation et le recours à la sédation, en les inscrivant dans leur contexte éthique. Et il plaide pour l’accompagnement des malades et la prise en compte de leurs souhaits, à partir des directives anticipées et la désignation d’une personne de confiance ainsi que la transparence de procédures médicales collégiales.

Mais il n’élude pas les évolutions nécessaires pour la loi depuis 2005 et il développe les 20 propositions de la Commission d’évaluation déposées le 28 novembre 2008. Elles ont trait à quatre préoccupations majeures :

  • Mieux faire connaître la loi, tant au niveau du public que des professionnels de santé,
  • Renforcer les droits des malades,
  • Aider les médecins à mieux répondre aux enjeux éthiques du soin
  • Adapter l’organisation du système des soins aux problèmes de la fin, de vie.

Au-delà même, il s’interroge sur un certain nombre de questionnements qui restent encore ouverts et il continue en avançant une classification des différents « droits à choisir sa mort » envisageables et invite les citoyens à situer le souhaitable, l’acceptable, l’interdit ... avant de terminer en appelant à persévérer dans la voie de la sagesse.

Il s’agit d’un essai brillant, synthétique, très vivant, écrit dans un style alerte, qui nous incite, tous, accompagnants bénévoles, tout autant que personnels soignants et citoyens que nous sommes, à réfléchir à des situations complexes et toujours personnelles, sans raisonnement simpliste et dans une vision profondément humaniste du soin.

Jacqueline


L’ultime liberté ?

Axel Khan - Tribune Libre - Éd. Plon

Axel Kahn, médecin et chercheur en génétique est actuellement le président de l’université Paris-Descartes ; "L’ultime liberté ?" est un essai brillant et limpide sur le thème de l’euthanasie.
Dés le début de l’introduction, l’auteur place ses propos dans le cadre de la loi Léonetti, et tout au long du livre, d’une écriture rapide et limpide, fait le point sur la question.

Les "affaires" (Vincent Humbert, Chantal Sébire...) et la façon dont elles ont été traitées par les médias, le rôle de l’ADMD et bien d’autres questions soulevées par le débat sur l’euthanasie nourrissent sa réflexion.
Parmi tous les thèmes abordés dans ce livre très riche, des propos philosophiques sur les notions de dignité, de liberté ; très intéressante aussi, son étude de la manipulation par "l’émotionnel".

La démarche d’Axel Kahn s’ancre, il ne s’en cache pas, dans le traumatisme du suicide de son père voici bientôt 40 ans.
D’autres expériences personnelles relatées ici atténuent le côté austère du sujet et le replace dans notre complexité humaine.

Un point est fait aussi sur l’aspect législatif, chez nous, et à l’étranger.
Ce livre, on l’aura compris ne peut qu’enrichir notre réflexion de bénévoles.

Béatrice



Éthiques de la Fin de Vie

Paula la marne - La bioéthique en question - Collection Ellipses

L’auteure enseigne au C.H.U. de Bicêtre et de Créteil. Elle aborde l’éthique de la fin de vie sous les différents aspects de l’Acharnement Thérapeutique, l’Euthanasie et les Soins Palliatifs.

Après avoir abordé l’aspect historique de l’acharnement thérapeutique qui permet de mieux comprendre le pourquoi, elle note que l’idée d’euthanasie s’est développée, au moins récemment, sous l’influence de I’ADMD (Association pour mourir dans la dignité) en parallèle avec le développement des Soins Palliatifs. Ces deux options différentes ont fait un bout de chemin l’une

La différence fondamentale réside dans leur philosophie : humanisme matérialiste pour l’une et un humanisme transcendant pour les autres, avec la dimension spirituelle de l’homme ; valeurs très différentes sur lesquelles le livre apporte un bon éclairage et permet au lecteur de faire son propre chemin.

Ce livre est à la disposition des bénévoles Rue de la Girafe, à Baclesse, et à Villers-sur-Mer.

Marie-Paule


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